Cette semaine, nous avons discuté avec Clément d’Oldyssey, un projet qui donne la parole aux « vieux » du monde entier pour que la vision que nous avons sur la vieillesse évolue vers quelque chose de plus positif.
Le projet a été lancé en 2017 quand ses fondateurs, Clément et Julia, sont partis faire un tour du monde et voir les « vieux » du monde entier. Ils les ont rencontrés, les ont filmés, et ont posté les vidéos sur leur page facebook, atteignant ainsi plusieurs millions de vues. Ils ont également publié un livre Un tour du monde de la vieillesse, à la rencontre des initiatives qui rapprochent les générations et le format poche sort le 22 octobre sous le titre Vieillir ensemble aux Editions du Seuil / Points.
Malle d'Aventure : D’où vous est venue l’idéede faire un tour du monde de la vieillesse?
Clément de Oldyssey : « Tous les deux, on avait des relations très privilégiées avec nos grands-parents.
J’ai été marqué par la fin de vie de ma grand-mère atteinte d’Alzheimer. Malgré la maladie, on pouvait garder un lien fort. Elle me faisait rentrer dans son univers. Son comportement, dû à la maladie, pouvait avoir des côtés cocasses voire poétiques.
Ces expériences étaient en décalage avec ce que l’on a généralement comme représentations de la vieillesse dans les médias : elle est perçue comme un naufrage, elle est triste...
On fait face à un double enjeu autour de la transition démographique : l’espérance de vie s’allonge et le nombre de personnes âgées augmente.
Notre but était de changer le regard sur la vieillesse et le grand âge, en donnant la parole aux premiers concernés. Nous voulions apporter un regard plus positif sur les vieux et nous inspirer des initiatives qui existent dans d’autres pays. Le résultat est net : en changeant de culture, le regard sur la vieillesse peut être très différent. »
Quand vous parlez des personnes âgées, vous dites «les vieux», pourquoi ce choix de mot?
« Le vocabulaire employé fait partie de la mission de changer le regard sur la vieillesse. « Vieux » est un mot que l’on essaie toujours de contourner : on parle de senior, ainé, personne âgée, etc… En plus c’est une formule qui est associée à des connotations négatives : personne ne veut être considéré comme vieux, c’est presque une insulte. Le mot « jeune » a moins de mal à être employé, il est associé à des représentations positives comme le progrès, le futur, le dynamisme.
En mettant en avant des vieux qui sont des moteurs du changement et qui font de choses pour les jeunes, on réhabilite ce mot de « vieux » et on rééquilibre la balance. »
Pouvez-vous nous raconter une anecdote de voyage qui vous a particulièrement marqués?
« On a été marqué par notre rencontre avec des grands-mères du Sénégal qui se mobilisent contre les mariages forcés et l’excision : le GrandmotherProject.
Dans une société où les hommes prennent les décisions, leurs mères arrivent à avoir suffisamment d’influence pour changer les choses. Leur rôle est décisif et permet de faire évoluer la société et les traditions pour changer la vie des jeunes filles.
On peut s’en inspirer. Elles sont la preuve que les vieux peuvent être écoutés, qu’ils ont des choses à enseigner.»
Quels ont été les retours que vous avez eu sur vos vidéos et le livre?
« On a eu de très bons retours ! Les vidéos ont très bien marché : plus d'une dizaine de vidéos on atteint des centaines de milliers de vues voire plus d’un million pour trois d'entre elles.
Beaucoup de gens sont en demande d’initiatives positives.
Nos vidéos intéressent les jeunes dans leurs relations avec leurs grands-parents, les aidants vis-à-vis de ceux qu’ils accompagnent, les pros… tout le monde peut se sentir concerné. »
Quel est aujourd’hui votre rapport aux séniors avec la covid ? Comment vous êtes-vous adapté?
« Pendant le confinement, on avait lancé un format appelé « les confinades ». On appelait les vieux pour monter qu’ils avaient toujours de choses à dire et ne pas les réduire à des personnes à risques.
Récemment, on a fait une vidéo avec des vieux en visio. On a parlé de la covid, de l’âge, du monde d’après… les vieux ont témoigné et nous ont donné leurs avis.
On a aussi lancé le projet "ShareAmi" qui met en relation des aînés et des jeunes ne parlant pas bien français pour qu’ils discutent ensemble en visio. C’est valorisant pour les aînés de se sentir utiles et les jeunes sont contents de ces échanges qui leur permettent d’améliorer leur français. »
Que prévoyez-vous pour la suite? Allez-vous poursuivre l’aventure et comment?
« Notre livre Un tour du monde de la vieillesse, à la rencontre des initiatives qui rapprochent les générations, sort le 22 octobre empoche sous le titre Vieillir ensemble aux Editions du Seuil / Points avec une préface inédite d'Edgar Morin.
En rentrant de notre tour du monde, on a continué par un tour de France.
On prévoit de continuer à créer des vidéos dans lesquelles les vieux sont mis en avant comme des héros. On a réalisé un documentaire sur les mamies foot en Afrique du Sud et en France : on a créé une équipe (qui a continué à s’entrainer et va reprendre les entrainements) et on a organisé un match !
On fera aussi les portraits de personnes âgées qui incarnent particulièrement des pans de notre culture, sur des savoirs faires qui se perdent en particulier. »
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